Passer au contenu

Université de Montréal

Tara Chanady

J’ai d’abord fait un bac en science politique et philosophie en 2009. C’était un cursus plus traditionnel et, à l’époque, je me suis sentie marginalisée. Je n’osais pas parler de mon identité lesbienne ou d’enjeux queers. Par la suite, je me suis beaucoup impliquée pour que les personnes qui entrent à l’université se sentent plus incluses. Pendant mon doctorat en communication, j’ai cofondé Minorités lisibles, une revue féministe et queer qui mettait de l’avant la recherche LGBTQ+. J’ai aussi participé à l’organisation du colloque « Le féminisme prend sa place à l’UdeM » pendant trois années consécutives. J’ai ensuite fait un postdoctorat à l’École de santé publique. Ma formation m’a permis d’aborder plusieurs enjeux LGBTQ+, particulièrement ceux qui touchent aux femmes de la diversité sexuelle.

Sur quoi portent vos recherches?

Au doctorat, je me suis intéressée aux espaces et aux identités des femmes lesbiennes, bisexuelles et queers à Montréal et, au postdoctorat, à la santé mentale et à la consommation de substances chez les jeunes de la communauté LGBTQ+. J’ai voulu étudier les obstacles et les préjugés auxquels les personnes issues de la diversité sexuelle et de genre font face dans la sphère sociale et la sphère médicale, par exemple la difficulté à avoir accès à des soins de santé complets. En tant que chargée de cours en communication à l’UdeM, j’ai enseigné des approches critiques qui remettent en question les idées qu’on se fait du genre et de la sexualité telles qu’elles sont perpétuées par les discours socioculturels majoritaires.

Quel est votre engagement au sein de la communauté 2SLGBTQIA+?

Je suis directrice générale du Réseau des lesbiennes du Québec, qui est un organisme communautaire défendant les droits de cette communauté. Je suis aussi vice-présidente du conseil d’administration de Fierté Montréal et je siège à celui du Centre de recherche communautaire, un organisme de Vancouver qui promeut la santé des personnes issues de la diversité sexuelle et de genre. Les organismes communautaires font de plus en plus de recherche et, un de mes objectifs, c’est de faire le pont entre leur travail et celui du milieu de l’enseignement. On doit valoriser la vulgarisation des connaissances et encourager leur circulation dans les différentes sphères de la société. C’est d’ailleurs ce qui m’a incitée à travailler pour des organismes sur le terrain. Ils mènent des études scientifiques légitimes, en collaboration ou non avec des universités, qui peuvent contribuer à un changement social plus profond. Par exemple, le Réseau des lesbiennes du Québec a noué un partenariat avec l’École de santé publique de l’UdeM pour un projet de recherche sur les services en santé sexuelle offerts aux femmes et aux personnes lesbiennes, bisexuelles et queers. Nous avons également présenté nos recherches au Sommet du Centre de recherche communautaire à Vancouver et nous collaborons avec lui à des projets touchant la santé sexuelle des femmes de la diversité sexuelle.

Quel rôle les universités doivent-elles jouer pour contrer l’homophobie et la transphobie?

Les universités jouent un rôle très important dans le contexte actuel, alors qu’on assiste à une montée des discours haineux particulièrement envers les personnes trans et non binaires. L’éducation permet de développer sa pensée critique, de déconstruire les normes établies et d’adopter d’autres formes de discours. La recherche et l’enseignement, notamment en communication, peuvent contrer la haine et la mésinformation dans les médias sociaux. Les universités forment les spécialistes de demain et ce qu’on y enseigne se reflétera par la suite dans l’espace public. Elles doivent donc s’assurer que le contenu de leurs cours est inclusif et mieux adapté à la réalité des personnes issues de la diversité sexuelle et de genre, que ce soit dans le domaine de la santé ou du travail social. Par exemple, on constate beaucoup de lesbophobie dans les soins gynécologiques et un manque de connaissances sur les enjeux liés à la diversité de genre. Certaines formations permettraient à ces clientèles d’être mieux comprises et accompagnées.