Je reproduis la lettre d’opinion que j’ai écrite en réaction au reportage de La Presse sur l’inconduite scientifique, et qui est parue aujourd’hui dans les pages du quotidien.
Le dossier que La Presse+ a consacré à l’inconduite scientifique est troublant pour toute personne qui croit, comme moi, au caractère fondamentalement idéaliste de la science.
Le phénomène est certes marginal – même si le nombre de fraudeurs augmente, mécaniquement, avec la démocratisation de l’enseignement supérieur et l’augmentation du nombre de chercheurs. Mais que des chercheurs, dont la première mission est de faire avancer les connaissances, nuisent aux avancées scientifiques en falsifiant des données ou en plagiant des collègues heurte le sens commun.
Heureusement, la science finit toujours par triompher. C’est le génie de la méthode scientifique : elle est infalsifiable. Tôt ou tard, on finit par découvrir le pot aux roses. Le problème, comme le montre l’enquête de La Presse+, c’est que, dans le secteur médical et biomédical, lorsque la découverte de la supercherie est tardive, cela peut avoir une incidence sur la santé, voire même la vie des patients.
Voilà pourquoi les universités ne peuvent s’en remettre uniquement au processus de validation par les pairs, qui peut parfois prendre des années avant de mettre à jour une inconduite scientifique. Elles ont elles-mêmes la responsabilité de mettre en place des mécanismes qui diligentent l’enquête lorsqu’il y a des soupçons ou des doutes sur l’intégrité d’un chercheur ou l’éthique d’une recherche.
RIGUEUR EXEMPLAIRE
Le milieu scientifique demeure, dans son ensemble, un milieu d’une rigueur exemplaire. C’est la nature même de sa quête. La communauté scientifique a un système immunitaire des plus sophistiqués, les méthodes de détection se sont améliorées au fil des ans et nous avons des moyens accrus pour détecter les anomalies et les faire cesser.
Ces dernières années, les organismes subventionnaires québécois et canadiens se sont dotés de politiques sur la conduite responsable en recherche, et les universités ont revu leurs procédures pour tenir compte de ce nouveau cadre législatif.
À l’UdeM, nous avons rehaussé le niveau d’encadrement et mis sur pied, en janvier dernier, un Bureau de la conduite responsable en recherche.
Ce bureau est unique au sein des universités canadiennes en ce qu’il intègre la gestion de l’éthique de la recherche et l’étude des cas de manquement en intégrité scientifique.
Comme le mentionnait notre vice-rectrice à la recherche, à la découverte, à la création et à l’innovation, la Dre Marie-Josée Hébert, il est possible que la création de notre Bureau de la conduite responsable en recherche fasse augmenter le nombre d’enquêtes menées au sein de notre université. Mais en augmentant les ressources et en appuyant nos équipes de façon proactive, nous pourrons mieux veiller au respect des bonnes pratiques, mieux déceler les besoins de formation en la matière et promouvoir une véritable culture de la conduite responsable à laquelle tous les membres de la communauté universitaire pourront s'identifier.
Il y aura toujours des « souris truquées », titre d’une célèbre enquête menée sur la question il y a quelques années. Mais cela ne doit pas nous faire douter des innombrables travaux qui apportent de réelles contributions à l’édifice de la connaissance, ni des universités qui, dans ce siècle des fake news, demeurent le principal foyer de production du savoir et de la vérité scientifique.