La semaine prochaine, des centaines de personnes se presseront au Centre culturel canadien de Paris. La raison de cette affluence? La présence de délégation de l’Université de Montréal prête à recevoir les candidatures des jeunes Français qui souhaitent venir étudier à Montréal. Des rencontres comme celles-là se tiennent un peu partout en France et ailleurs dans le monde, pour l’UdeM tout comme pour les autres universités québécoises.
L’engouement pour les études supérieures québécoises n’est pas étonnant : nous offrons des formations de premier plan, reconnues internationalement, et nous le faisons à un prix très compétitif.
Ces avantages sont évidents pour qui connaît un peu la situation de l’enseignement supérieur ailleurs dans le monde. Les étudiants étrangers ne s’y trompent pas; ils s’inscrivent en grand nombre dans toutes les universités québécoises. Aujourd’hui, sur le campus de l’Université de Montréal, un étudiant sur dix vient de l’étranger. Et même la hausse des droits pour les étudiants français, décidée par le gouvernement, s’est traduite par un léger fléchissement des inscriptions cette année, la situation ne devrait pas changer sur le long terme.
La question, néanmoins, mérite d’être formulée clairement : pourquoi devons-nous continuer d’accueillir des étudiants étrangers? Et quelles balises devrions-nous mettre en place pour que l’échange soit équitable?
Le premier bénéfice de cette importante présence des étudiants étrangers touche la vitalité de nos campus et la qualité de l’expérience que nous pouvons offrir à l’ensemble de nos étudiants. Les étudiants québécois enrichissent leur vision du monde en se frottant aux étudiants qui nous viennent d’ailleurs. Et ils développent des réseaux de collaboration et d’amitié qui les suivront leur vie durant.
Un deuxième aspect porte sur notre responsabilité à l’égard des étudiants des pays en voie de développement. Pour ces étudiants, les perspectives d’études supérieures sont souvent limitées. Plusieurs trouvent chez nous les formations de pointe qui leur permettront de contribuer puissamment au développement de leur pays à leur retour.
Les étudiants qui ont passé quelques années ici, au Québec, et qui repartent vivre dans leur pays ou ailleurs demeurent des ambassadeurs du Québec. Ce réseau de gens influents, bien formés et qui ont appris à connaître le Québec, prend toute sa valeur lorsque vient le temps de mener des projets de recherche scientifique, de mettre sur pied des réseaux de collaboration culturelle ou de fonder des entreprises.
Enfin, plusieurs étudiants internationaux choisissent de s’établir au Québec. Les universités, on le sait, sont de formidables portes d’entrée pour les immigrants. L’accueil qui leur a été fait dans les universités constitue un premier pas dans leur démarche d’immigration, une immigration facilitée par la formation, l’apprentissage du français et l’intégration réalisée sur nos campus. Il serait d’ailleurs utile d’arrimer encore davantage nos politiques d’immigration avec nos règles sur l’accueil d’étudiants internationaux.
Tous ces bénéfices sont réels pour notre société comme pour les étudiants internationaux, bien que difficilement quantifiables.
Il y a un pas que nous ne devons toutefois pas franchir, et c’est celui qui nous mènerait à admettre dans nos universités un nombre toujours plus grand d’étudiants étrangers pour pallier nos difficultés financières.
En effet, les étudiants étrangers – y compris, depuis cette année, les étudiants français – paient des droits de scolarité beaucoup plus élevés que les étudiants québécois. Alors que notre société peine à financer adéquatement son réseau universitaire, la tentation peut être forte de privilégier l’admission des étudiants étrangers sur celle des étudiants d’ici.
Or, en procédant de la sorte, nous risquons de faire passer les raisons économiques avant les raisons académiques. Ce qui n’est jamais une bonne approche.
Nos universités veulent accueillir des étudiants étrangers. Mais elles veulent les accueillir pour de bonnes raisons et non pour des considérations purement budgétaires. La qualité de la formation et de la recherche et la diversité de nos campus sont de bonnes raisons. L’intégration d’immigrants qualifiés qui contribueront au dynamisme du Québec est aussi une bonne raison.
S’en remettre aux étudiants étrangers pour financer nos universités, c’est implicitement avouer que nous n’avons pas les moyens de nous payer le système universitaire que nous prétendons vouloir.
Lettre ouverte parue dans La Presse