La semaine dernière, plus de 300 000 étudiants et étudiantes sont entrés en classe dans les universités québécoises. C’est un rituel qui nous émerveille chaque fois, le début d’un temps nouveau à petite échelle, un rite de passage individuel et collectif qui est la promesse de connaissances à acquérir, de rencontres à faire, de diplômes à obtenir et, dans bien des cas, de professions à exercer. C’est l’avenir en marche.
Et cet avenir se dessine sous les meilleurs auspices. Au Québec, mais surtout à Montréal.
Le boom montréalais
Pas nécessaire de lire le dernier bilan économique de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) pour voir que notre ville a le vent dans les voiles. Tous les indicateurs sont au vert : taux de chômage en baisse, taux d’emploi en hausse, multiplication des grands projets publics, dynamisme de l’entrepreneuriat, même les cônes orange cartonnent!
Il ne se passe pas une semaine sans qu’on annonce l’installation d’une entreprise sur le territoire montréalais. C’est tout particulièrement vrai dans un domaine émergent où Montréal est en train de devenir un authentique leader mondial : l’intelligence artificielle. Dernière arrivée en date : Jumio, une entreprise de la Silicon Valley spécialisée dans la vérification d'identité en ligne.
Le secteur public n’est pas en reste. L’enseignement et la santé dynamisent un marché de l’emploi qui affiche une performance inédite en près d’un demi-siècle. Le taux d’emploi a atteint un niveau record et dépasse non seulement celui du Canada pour la première fois depuis 1975, mais aussi celui des États-Unis!
Ce que je dis de Montréal, je peux le dire aussi de l’ensemble du Québec. Il se passe des choses au Québec, et pas uniquement dans le monde des affaires. L’édition littéraire – de ce qu’on me rapporte – est en pleine effervescence. Le milieu musical est d’une remarquable vitalité. Et nos cinéastes sont reconnus internationalement.
Un facteur de risque : la sous-scolarisation
Tous les domaines d’activité que je viens d’évoquer ont un point en commun : leur développement est fonction du niveau de scolarité.
Or, ce bel élan risque justement d’être freiné par la sous-scolarisation de la population montréalaise. La part des diplômés universitaires a stagné de 2012 à 2016 à Montréal. « Montréal, avec Edmonton et Québec, continue d’avoir un taux de grades universitaires inférieur à celui de la moyenne des métropoles américaines », note la CMM. Le retard scolaire de Montréal s’est même creusé parmi les travailleurs les plus jeunes : chez les 25-34 ans, Toronto affiche un taux de diplomation universitaire de 52 %, alors qu’à Montréal il est de 44 %.
Ce phénomène de sous-scolarisation, qui commence dès le secondaire, devrait nous interpeller tous et au premier chef les politiciens engagés dans la campagne électorale. Plus de 80 % des emplois créés au Québec l’an dernier exigeaient un diplôme d’études collégiales ou universitaires.
Les universités sont, évidemment, bien davantage que des établissements de formation pour le marché de l’emploi existant. Par bien des aspects, elles créent les emplois de demain – on le voit dans les secteurs de l’intelligence artificielle et de l’analyse des données. Et bien entendu, leur contribution à l’épanouissement des individus comme des collectivités est proprement incalculable.
À la fin du 19e siècle, l’économiste John S. Mill affirmait qu’il est impossible de mettre un prix sur l’éducation, car ce n’est qu’une fois qu’elle est acquise qu’on peut en déterminer la valeur réelle. L’éducation, en effet, n’a pas de prix et l’on ne sait pas ce que demain lui réserve. Voilà pourquoi il faut un acte de foi en elle. Pour enseigner. Pour étudier. Et surtout pour financer nos écoles et nos universités.