À l’heure où j’écris ces lignes, les jours de la Conférence des recteurs et principaux des universités du Québec (CREPUQ) sont comptés, du moins dans la forme qu’on lui connaît depuis sa création, il y a 50 ans. Après l’Université Laval et l’Université de Montréal, la majorité des constituantes du réseau de l’Université du Québec ont fait savoir qu’elles se retireraient de l’organisme au cours des prochains mois. De plus, il ne faudrait pas oublier qu’en annonçant la création d’un Conseil national des universités, le Gouvernement signifiait qu’il allait récupérer des composantes actuelles de la CREPUQ.
Les événements de la dernière année ne sont pas la seule cause de l’éclatement de la CREPUQ. Mais il est clair que ces événements ont cristallisé l’absence d’une position commune au sein d’un groupe qui rassemble des établissements très différents les uns des autres.
On l’oublie souvent : les universités ne sont pas toutes coulées dans le même moule. Certaines sont jeunes, d’autres ont une tradition qui remonte à près de deux siècles. Il y en a qui sont entièrement orientées vers un secteur d’activités, d’autres qui sont beaucoup plus engagés dans ce qu’on appelle les sciences fondamentales. Pour certaines universités comme l’UdeM, la recherche compte pour près de 50 % de toutes les activités; pour d’autres, ce volet de la mission demeure marginal.
Même au sein d’une discipline, des différences importantes existent entre les universités. Lorsque le département d’histoire de mon université recrute un dix-huitièmiste spécialiste de Rousseau, il se positionne par rapport à d’autres départements d’histoire, du Québec et d’ailleurs dans le monde. La spécialisation du savoir colore l’offre des programmes et des cours offerts par chaque université.
Devant une telle disparité, rien d’étonnant à ce que la recherche de consensus soit ardue, voire impossible. Ce dont les universités viennent de prendre acte. Dorénavant, l’UdeM parlera en son nom propre et défendra ses dossiers selon l’approche qui lui convient.
Est-ce la fin de la concertation entre universités ? Certainement pas. Mais je pense qu’à l’avenir, cette collaboration se fera à la pièce, selon la nature des dossiers et sur la base d’alliances ponctuelles et stratégiques en fonction des intérêts de chaque établissement.
Au Québec, nous avons longtemps regardé les universités comme un groupe homogène. Derrière la crise que traverse la CREPUQ se dessine en fait l’affirmation de l’autonomie universitaire et de personnalités institutionnelles distinctes. Et si le moment est difficile à passer, je suis persuadé qu’à long terme, tout le réseau en ressortira plus fort.